Quatre heures de la vie d'une villageoise indienne.

Levée à 4 heures du matin, sans réveiller les autres qui dorment encore, la villageoise indienne balaie le seuil en terre de la maison. 

Avec une dextérité qui lui est propre, elle mouille le sol en puisant de ses mains dans un seau un mélange d'eau et de bouse de vache fraîche. Une fois séché, ce mélange donnera un aspect rigide au chemin de terre et éloignera les microbes. 

Avant que le sol n'absorbe ce mélange,  elle y trace un kôlam en faisant glisser entre son pouce et son index un mélange del farine de riz et de calcaire, un don aux insectes et aux oiseaux : la bonne action du matin. C'est aussi parce que Lakshmi, la déesse de la fortune ne pénètre que dans les maisons propres et accueillantes.

Ensuite, munie de récipients, elle part, accompagnée de ses voisines, jusqu'au point d'eau potable le plus proche. Certains hommes utilisent leur vélo pour aller chercher l'eau mais ils doivent attendre que les femmes se soient servies. En Inde, l'eau est rationnée et n'est disponible que quelques heures le matin, une heure le midi et quelques heures le soir. En journée,  priorité aux agriculteurs pour irriguer leurs champs. 

De retour à la maison, avec son chargement d'eau (30 L environ), elle referme les cruches avec une assiette. L'eau y reste toujours fraîche, quelque soit la saison.
Puis dans l'arrière cour, elle utilise la pompe à eau manuelle  en fer qui a pris la place du puits pour remplir seaux et cruches. L'eau n'est pas potable et est légèrement salée, un peu opaque mais elle est utilisable pour la vaisselle, la lessive et le bain.
A la lumière de lampes à huile, elle nettoie sa "cuisinière" faite de trois foyers en terre cuite posée à même le sol en l'enduisant de bouse de vache liquide, y trace de jolis kôlams et allume le feu avec du bois disposé dans la cour arrière, un peu de kérosène et des galettes de bouse de vache séchées avec de la paille. Elle souffle dans un tuyau en fer pour attiser le feu et dès qu'elle voit que les trois foyers sont alimentés, elle y pose les énormes cruches en aluminium ou en terre, pour faire chauffer l'eau de bain pour toute la famille.

Avant que la maisonnée ne se réveille, elle se rend à l'étable, balaie et ramasse la précieuse bouse dans un seau. Puis, elle trait la vache en lui parlant doucement.


Elle se dépêche de rentrer préparer le thé pour tous. Elle fait bouillir le lait car on ne boit que du thé au lait en Inde. Elle en retire deux louchées pour faire son yaourt et coupe le lait  avec un quart d'eau ou plus selon le nombre de personnes à la maison. Lorsque qu'ils ne sont pas nombreux, elle en vend au laitier qui fournit les maisons qui n'ont plus de vaches laitières. Le thé est prêt, bien sucré et gardé au chaud dans chaque timbale près du feu. Chacun se sert mais elle va servir son époux elle-même, une façon de lui souhaiter le bonjour.

Entre temps, elle peut prendre "son bain" ou plutôt sa douche rapidement dans la salle d'eau où elle a préalablement rempli et refroidi légèrement l'eau chaude des cruches bouillantes dans un grand seau en cuivre qu'elle a transporté jusque là. Elle frotte un bout de safran sec sur une pierre pour nettoyer son visage et utilise un savon ayurvédique parfumé qui lui enlève l'odeur de la bouse. Elle laisse tremper son linge pour le laver plus tard avec les vêtements de sa famille. Elle va ensuite se maquiller devant le miroir du salon : crème, poudre de santal, khôl aux yeux et le traditionnel pottou ( point rouge sur le front soit avec un liquide rouge ou du kumkum, poudre rouge obtenue avec du safran séché et moulu).

Pendant que les autres membres de la famille se douchent à leur tour, elle prépare un copieux petit déjeuner.
Vers huit heures, tout le monde est assis en tailleur par terre, devant une petite feuille de bananier et attend d'être servi par la maîtresse de maison.

Pour elle, la journée ne fait que commencer...

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